Le puits de Moïse a été souhaité par Philippe II de Bourgogne, dit Philippe le Hardi (1342-1404). Celui-ci était autrefois au centre du grand cloître de la Chartreuse de Champmol. Le puits se situe actuellement au sein de l’hôpital psychiatrique de la Chartreuse à Dijon entre la Gare SNCF et le siège du journal Le Bien Public au 1 Boulevard Chanoine Kir. Il est toutefois possible de le visiter toute l’année. La visite libre coûte 3,50 euros, c’est gratuit pour les moins de 18 ans. Lors des journées du Patrimoine, vous aurez en général une visite guidée gratuite.
Histoire du Puits de Moïse
Philippe le Hardi, duc de Bourgogne, est le 4e et dernier fils du roi Jean II de France, dit Jean le Bon. L’objectif de la Chartreuse de Champmol était de devenir la nécropole des ducs de Bourgogne. La sépulture des ducs devaient être proche de leur lieu de résidence (à Dijon) et rivaliser avec la nécropole des rois capétiens à Saint-Denis. Après la mort de Philippe le Hardi, premier Duc de Bourgogne, les Ducs de Bourgogne ont émis le souhait selon leur testament d’être rapatriés quels que soit le lieu de leur mort puis inhumé à la Chartreuse de Champmol. Mais, lors de la révolution française les tombeaux des Ducs de Bourgogne qui étaient à la Chartreuse ont été saccagés. En 1792, une partie des ossements ont été enterrés sous les tours de la cathédrale saint-Bénigne de Dijon. Le tombeau de Philippe le Hardy est aujourd’hui visible au palais des ducs de Bourgogne à Dijon.
Le puits de Moïse a été sculpté et peint à la fin du 14e siècle (1396-1405) par Claus Sluter. Il s’agit du vestige d’un calvaire dont la partie haute représentant Jésus Christ crucifié a été détruite. Sur la partie basse, vous pouvez remarquer les 6 prophètes Zacharie, Daniel, Isaïe, Moïse, Jérémie et David. Le puits de Moïse reste à ce jour l’un des plus beaux héritages de la sculpture de l’école bourguignonne médiévale. Malheureusement, beaucoup de dijonnais ignore son existence et la possibilité de le visiter au sein de l’Hôpital de la Chartreuse.
Que symbolise le Puits de Moïse ?
Les 6 prophètes de l’Ancien Testament ont vécu à des époques différentes. Ces 6 personnages sont considérés comme des serviteurs de Dieu ou des prophètes par les juifs, les chrétiens et les musulmans. Les chrétiens considèrent que les nombreuses prophéties annoncent bel et bien la venue du messie, Jésus Christ.
Bien que ces prophètes ne se soient pas forcément côtoyés, ils croyaient tous en la venue d’un messie, Jésus Christ, le Fils de Dieu, qui allait descendre sur Terre et qui allait mourir pour le salut de l’humanité. Dans la Bible, un prophète annonce un message venant de Dieu. Mais, il n’était pas possible de parler au sein du monastère. Sur les sculptures leur message prophétique est donc symbolisé par un phylactère. Sur ce phylactère, vous pouvez lire un extrait de leurs écrits. Certaines des sculptures lèvent les yeux vers le ciel. Est-ce un regard tourné vers le Royaume des cieux ou bien une incitation à la prière ?
Moïse
La sculpture de Moïse porte une longue barbe, habituelle dans le peuple d’Israël, et 2 cornes. Les cornes de Moïse n’ont pas de référence biblique. Il porte dans la main droite les tables de la loi aussi connues sous le nom de 10 commandements. Sur le phylactère qu’il tient de la main gauche, on peut lire : « Immolabit agnum multitudo filiorum Israhel ad vesperam ». Cette citation d’Exode chapitre 12, verset 6 a été écrite plus 1500 ans avant la mort de Jésus Christ. Elle signifie « Au soir, la multitude des fils d’Israël immolera l’Agneau ». A l’époque de Moïse, les juifs célébraient la libération divine de l’esclavage en Égypte le 14 nisan de chaque année. Nisan était le premier mois du calendrier lunaire. Selon les évangiles, l’Agneau, Jésus qui s’est offert en sacrifice a été tué par les fils d’Israël le 14 nisan.
Jérémie
En observant la statue de Jérémie, qui a vécu environ 600 ans avant Jésus Christ, vous noterez le phylactère qui tombe d’un livre que porte Jérémie. Sur ce phylactère on peut lire l’inscription suivante : « O vos omnes qui transitis per viam, attendite et videte si est dolor sicut dolor meus ». Ce verset des Saintes Écritures est tiré des Lamentations de Jérémie chapitre 1 (verset 12) : « Ô vous tous qui passez sur le chemin, regardez-moi et voyez s’il est une douleur semblable à la mienne ».
David
Selon la Bible, David jeune berger d’Israël a été choisi par Dieu pour devenir Roi. Vous pouvez voir sur sa tête une couronne, David a été le 2e Roi d’Israël après Saül. David également musicien, tient dans sa main droite une harpe en partie caché par son manteau. Sur le phylactère vous pouvez lire : « Foderunt manus meas et pedes meos, numerarunt ossa ». C’est un extrait du Psaume 22 (verset 17) qui dit en prophétisant ce qu’il devait arriver lors de la mort de Jésus Christ : « ils percèrent mes mains et mes pieds. Ils nombrèrent mes os ».
Zacharie
Le prophète Zacharie a lui vécu 500 ans avant Jésus Christ. Il ouvre grand les bras. Il semble affligé par le message prophétique concernant le messie qu’il vient d’écrire : « Appenderunt mercedem meam triginta argenteos ». Ce message signifie : « Ils pesèrent mon salaire à trente deniers d’argent » (Zacharie chapitre 11, verset 12). Ce message s’est réalisé lors de la trahison d’un des apôtre de Jésus, Judas Iscariote, qui a trahi Jésus pour 30 deniers.
Daniel
Daniel, qui a vécu environ 500 ans avant Jésus Christ, a sa tête tournée vers la gauche en direction du prophète Isaïe. Il pointe son phylactère du doigt. Celui-ci porte l’inscription suivante : « Post hebdomadas sexaginta duas occidetur Christus ». Cela signifie selon Daniel chapitre 9, verset 26 « Après soixante-deux semaines, Christ sera tué ». Cette prophétie annonçait le moment de la venue du messie.
Isaïe
Le prophète Isaïe porte un livre sous son bras gauche. Sa tête est incliné vers la droite en direction de Daniel. Dans sa main droite, il tient un phylactère avec cette inscription : « Sicut ovis ad occisionem ducetur, et quasi agnus coram tondente se obmutescet et non aperiet os suum ». Cette prophétie a été révélée plus de 700 ans avant la mort de Jésus. On la retrouve en Isaïe chapitre 53, verset 7 : « Il sera mené à la mort comme une brebis qu’on va égorger ; il demeurera dans le silence sans ouvrir la bouche, comme un agneau est muet devant celui qui le tond. »